Novembre 2024 - Quand on perd courage !
Que faire quand on perd courage face à des situations de blocage ? Certains vont utiliser des stratégies d’évitement face à ces situations qui pourraient les angoisser ou leur demander une démarche exigeante, une prise de responsabilité. D’autres vont affronter la réalité de ces situations en devenant de plus en plus frustrés et irritables, avec le risque à long terme de finir désabusés pour le premier cas ou en burnout pour le second.
En 2 Cor 4, 1 à 16, l’apôtre Paul emploie à 2 reprises l’expression « nous ne perdons pas courage ». Quand on pense à tout ce qu’il a subi de la part des oppositions venant des non croyants et aussi de celles venant de l’intérieur même des communautés chrétiennes, on reste rêveur. Où a-t-il puisé cette endurance ? Dans son caractère de battant, de self-made man ? Non, car comme tous les êtres humains normalement constitués il était lui aussi un « vase de terre » (vt7), fragile, parfois impuissant car limité comme nous tous. Serait-ce alors dans le concept surmédiatisé de résilience mis à toutes les sauces et développé en France par le neuropsychiatre Boris Cyrulnik, cette capacité qui serait inhérente à tout homme pour surmonter les chocs traumatiques ? Comme l’ont souligné certains auteurs et psychologues cette notion est problématique : elle établit de fait une distinction morale voire vertueuse qui peut s’avérer culpabilisante pour ceux qui n’auraient pas cette ressource intérieure. D’autre part, ce concept anthropologique ne prend pas en compte la dimension spirituelle, à savoir l’acharnement que notre ennemi commun et accusateur peut mettre en œuvre pour nous décourager, raison pour laquelle les armes avec lesquelles nous devons combattre le découragement ne peuvent pas être « charnelles mais puissantes, par la vertu de Dieu, pour renverser les forteresses ». D’autre part « ce qui est né de la chair est chair et ce qui est né de l’Esprit est Esprit » (2 Cor 10, 4 ; Jean 3, 6). Enfin, Jésus nous a enseigné à prier en demandant au Père « délivre-nous du malin » pas des hommes (Mt 6, 13). En effet, le malin en connait un rayon sur le découragement, c’est même son fond de commerce et sa boutique est très bien achalandée en termes de clients et de marchandises…
Notre texte de 2 Cor 4 précise au vt1 que ce qui fortifie la foi de Paul pour ne pas perdre courage c’est le ministère de la miséricorde du Seigneur que le Saint Esprit nous communique (3,18 à 4,1) : « nous sommes transformés de gloire en gloire par l’Esprit du Seigneur. C’est pourquoi, ayant ce ministère selon la miséricorde qui nous a été faite, nous ne perdons pas courage ». Le Saint-Esprit ne serait-il pas assez puissant pour nous délivrer de l’abattement et du découragement ? Certes, il faut d’abord prendre la mesure de nos faiblesses, être réaliste pour les regarder en face, mais prenons garde que le diable ne nous paralyse et ne nous égare au point de nous réduire à ces faiblesses en nous focalisant dessus pour qu’au final nous perdions de vue la puissance miséricordieuse de Dieu bien plus grande que nos faiblesses. D’ailleurs, cette faiblesse bien réelle que nous partageons dans notre humanité, n’est d’aucune façon éliminatoire, elle doit justement nous porter à compter sur Dieu qui dans sa puissance miséricordieuse nous relève et nous fait reprendre courage. Et quel est le but de ce processus de relèvement ? « Afin que cette grande puissance soit attribuée à Dieu, et non pas à nous ». (vt7)
Est-ce que nos faiblesses vont rendre inopérante la puissance miséricordieuse de Dieu pour nous relever et reprendre courage ? Qui peut rivaliser avec la puissance du Saint Esprit ? Qui peut s’opposer à Dieu et rendre inefficace sa puissance miséricordieuse pour nous porter sur le chemin de la vie et nous redonner le courage que nous avons perdu ? Si Dieu est avec nous qui sera contre nous, qui nous accusera ? C’est Dieu en Christ qui nous justifie. Peut-être sommes-nous pressés mais non pas réduits, abattus mais non perdus, portant les signes de la mort de Jésus mais aussi ceux de sa résurrection (vts 8-11). Voilà la résilience à laquelle je crois, « c’est pourquoi je ne perds pas courage » (vt 16).
T.R.